Définition

 

Les principales caractéristiques de l'esclavage sont le travail ou des services par la force, ainsi que le fait que la personne physique est considérée comme la propriété d'une autre personne, son propriétaire, à la volonté duquel elle est entièrement assujettie. Depuis les temps les plus reculés, dans la plupart des sociétés, les esclaves ont été légalement rangés dans la catégorie des biens matériels et des instruments fonctionnels. Aussi pouvaient-ils être achetés, vendus, négociés, offerts en cadeau ou mis en gage pour une dette contractée par leur propriétaire, sans avoir d'ordinaire le moindre pouvoir d'objection personnelle ou légale.

 

Il y a souvent une différence ethnique entre les propriétaires et leurs esclaves et le phénomène de l'esclavage repose souvent sur le racisme ou sur le puissant préjugé de la « supériorité » du groupe ethnique auquel appartient le propriétaire sur celui des esclaves. L'asservissement par un propriétaire d'esclaves de membres de son propre groupe ethnique est exceptionnel, la Russie des XVIIème et XVIIIème siècles constituant une de ces rares exceptions.

 

Si la pratique de l'esclavage remonte aux temps préhistoriques, son institutionnalisation date vraisemblablement de l'époque où les progrès de l'agriculture permirent une forme d'organisation sociale plus développée. Les esclaves étaient utilisés pour différentes fonctions spécialisées dans ces sociétés qui se les procuraient soit par des rafles ou des conquêtes parmi d'autres populations, soit au sein de la société même, certaines personnes se vendant pour payer leurs dettes ou étant asservies en punition de leurs crimes.

 

Chronologie

 

Les Occidentaux détournent et amplifient à partir du XVème siècle le commerce des esclaves en ouvrant de nouvelles routes ; le premier transport direct d'Afrique vers les Antilles a lieu en 1518 et très vite la traite à destination de l'Europe devient marginale. Les esclaves servent à mettre en valeur l'Amérique. Des bateaux appartenant à toutes les puissances maritimes sont présents sur la côte de Guinée, bientôt appelée côte des esclaves pour participer à ce trafic très lucratif. Pour la France, la traite est autorisée par Louis XIII en 1642 et l'esclavage dans les colonies est réglementé par le Code Noir.

 

Trois marchés esclavagistes touchent les populations noires à l'époque moderne : le premier est celui des zones esclavagistes à l'intérieur même de l'Afrique, dans la région subsaharienne, le second, le Moyen-Orient et le Maghreb, le troisième, l'Amérique.

  1. La traite en Afrique subsaharienne : en Afrique subsaharienne, le prix des captives dépassait celui des captifs, car la productivité des femmes - non seulement comme domestiques, épouses et mères, mais aussi comme travailleuses - était supérieure à celle des paysans et des artisans masculins dans la plupart des sociétés de l'Afrique noire.

  2. La traite transsaharienne: les esclaves partaient vers les pays du Moyen-Orient. Là-bas, le prix des captives était plus élevé encore que dans la région subsaharienne, bien que des esclaves masculins y fussent aussi utilisés dans l'agriculture et dans les tâches militaires.

  3. La traite transatlantique (commerce triangulaire): dans l'Amérique latine tropicale du XVIème siècle, les colons espagnols obligèrent d'abord les populations indigènes à travailler la terre et à extraire l'or et l'argent. Ces populations indigènes ne survécurent pas aux conditions d'esclavage, les maladies européennes et le travail harassant les décimèrent.

 

 

Source : Cliotexte

 

Sous la pression de la Société des Amis des Noirs, les députés de la Convention abolissent une première fois l'esclavage pour calmer la révolte des esclaves (à Saint Domingue, la principale et la plus riche de toutes les colonies françaises les esclaves se soulèvent sous le commandement d'un chef nommé Toussaint Louverture) dans les colonies des Antilles et empêcher l'Angleterre de s'en emparer.

 

Devant ce soulèvement et les menaces d'invasion anglaise et espagnole, les commissaires de la République française à Saint-Domingue, Sonthonax et Polverel, se résignent à proclamer la liberté générale des esclaves. C'est chose faite le 29 août 1793 dans la province du Nord et le 4 septembre dans les parties ouest et sud.

 

L'abolition entraîne l'ajout d'un 18ème article à la déclaration des droits de l'homme et du citoyen :

Art. 18 - Tout homme peut engager ses services, son temps ; mais il ne peut se vendre, ni être vendu ; sa personne n’est pas une propriété aliénable. La loi ne reconnaît point de domesticité ; il ne peut exister qu’un engagement de soins et de reconnaissance, entre l’homme qui travaille et celui qui l’emploie.

 

Mais Napoléon Bonaparte avait abrogé cette mesure le 20 mai 1802, sitôt acquise la paix avec l'Angleterre. Ce faisant, le Premier Consul avait répondu à une demande du Sénat et cédé à la pression de sa femme, Joséphine de Beauharnais, née Tascher de la Pagerie, originaire de la Martinique.

 

(En 1802, sur ordre de Napoléon, le général Richepance rétablit l'Esclavage dans les colonies françaises, 8 ans après son abolition. Arrêté Richepance du 28 messidor an X)

Considérant que par l'effet de la révolution et d'une guerre extraordinaire, il s'est introduit dans les noms et les choses de ce pays des abus subversifs de la sûreté et de la prospérité d'une colonie ;

Considérant que les colonies ne sont autre chose que des établissements formés par les Européens, qui y ont amené des noirs comme les seuls individus propres à l'exploitation de ces pays ; qu'entre ces deux classes fondamentales des colons et de leurs noirs, se sont formés des races de sang-mêlé toujours distinctes des blancs, qui ont formé les établissements ;

Considérant que ceux-ci seuls sont les indigènes de la nation française et doivent en exercer les prérogatives ;

Considérant que les bienfaits accordés par la mère patrie, en atténuant les principes essentiels de ces établissements, n'ont servi qu'à dénaturer tous les éléments de leur existence, et à amener progressivement cette conspiration générale, qui a éclaté dans cette colonie contre les blancs et les troupes envoyées sous les ordres du général par le gouvernement consulaire, tandis que les autres colonies soumises à un régime domestique et paternel, offrent le tableau de l'aisance de toutes les classes d'hommes en contraste avec le vagabondage, la paresse, la misère et tous les maux qui ont accablé cette colonie, et particulièrement les noirs livrés à eux-mêmes ;

De sorte que la justice nationale et l'humanité commandent autant que la politique le retour des vrais principes sur lesquels reposent la sécurité et les succès des établissements formés par les Français en cette colonie, en même temps que le gouvernement proscrira avec ardeur les abus et les excès qui s'étaient manifestés anciennement et qui pourraient se remontrer encore.

(...) (les considérants sont suivis de 19 articles formant un nouveau code) Jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, le titre de citoyen français ne sera porté dans l'étendue de cette colonie et dépendances que par les blancs. Aucun autre individu ne pourra prendre ce titre ni exercer les fonctions qui y sont attachées (...)

 

Le Général Richepance (28 messidor, an X ; 17 juillet 1802)

 

La France interdit la traite en 1818 mais n'accepte le droit de visite qu'en 1831 et n'abolit l'esclavage dans ses colonies qu'en 1848, grâce au combat de V. Schoelcher et de son entourage.

 

Victor Schoelcher était un riche bourgeois. C'est son père qui était fabricant de céramique à Paris, qui lui a fait découvrir l'esclavage par hasard. En 1830, il envoya son fils en Amérique pour trouver de nouveaux clients. Victor Shoelcher ne trouva pas de clients mais découvrit l'esclavage et les affreuses conditions de vie des Noirs. Cette situation le révolta. Il visita les Etats-Unis d'Amérique, les Antilles ... et il commença à écrire.

 

Schoelcher n'était pas un très bon homme d'affaires. Ce qui l'intéressait, c'était la musique, la lecture, l'écriture et les voyages. Mais lui il ne voyageait ni pour découvrir ni pour conquérir, mais pour comprendre comment les gens vivaient dans les autres parties du monde.

 

Grâce à sa grande connaissance de l'esclavage et devenu membre du Gouvernement provisoire en tant que sous secrétaire d'état à la marine et aux colonies en 1848, il contribue à l'adoption du décret du 27 avril 1848 sur l'abolition de l'esclavage dans les colonies. Il réussit ainsi à imposer l'idée pour laquelle il se battait depuis presque vingt ans : abolir immédiatement l'esclavage et faire des Noirs des citoyens de la République.

 

Tout le monde n'était pas d'accord avec lui. En effet, il existe envers les Noirs ce que l'on appelle un préjugé de couleur. Cela veut dire que beaucoup de monde pense qu'être Noir veut dire être inférieur.

 

Après 1848, Victor Shoelcher continua sa vie politique. Il fut député de la Martinique et ensuite sénateur. Cependant durant tout le second Empire, à cause de ses idées, il dut vivre en Angleterre. Il était proscrit car républicain. Là, il partagea le sort d'autres personnages célèbres comme Victor Hugo dont il devint l'ami. En 1870, après la chute de Napoléon III, il rentra en France.

 

Victor Shoelcher continua à se battre pour ce en quoi il croyait : il voulait faire supprimer la peine de mort, que l'Etat se charge de l'éducation des enfants, que les femmes aient une meilleure position dans la société.

 

A la fin de sa vie, comme il ne s'était jamais marié et qu'il n'avait pas eu d'enfant, il décida de donner tout ce qu'il possédait.

 

Vie quotidienne

 

Avant la découverte des Amériques, les Portugais furent les premiers européens à importer des esclaves pour la main d'œuvre agricole qui leur manquaient. La technique utilisée par les Portugais pour acquérir des esclaves consistait à attaquer par surprise des villages dont les habitants étaient conduits au Portugal. Les Portugais qui inauguraient cette pratique en 1444, importaient entre 700 et 800 esclaves par an. Ces esclaves provenaient des comptoirs commerciaux et des forts établis sur la côte africaine.

 

L'exploration côtière de l'Afrique et l'invasion des Amériques par les Européens au XVème siècle conduisirent au développement du phénomène de traite des esclaves. Les plantations des Indes occidentales factuelles Antilles) demandant beaucoup de main-d'œuvre, l'Espagne de Charles Quint initie les opérations de déportation ; n'effectuant pas les opérations de transport, elle affecte le monopole de la traite à des compagnies qui s'engagent à fournir à tel ou tel territoire un nombre donné d'esclaves en bonne santé et en état de travailler.

 

De 1550 à 1560, 4 500 africains sont transportés annuellement outre-Atlantique par les Espagnols mais ces chiffres augmentent rapidement pour atteindre 40 700 à la fin du siècle.

 

Le Portugal commence ce même trafic, un peu plus tard, vers 1540, emmenant 400 Noirs au Brésil (à la fin du XVème siècle le chiffre passera à 1 500). Bientôt toutes les nations européennes se livrent à la traite, Hollande en tête, puis Angleterre, France et Danemark.

 

Dans l'Amérique latine tropicale du XVIème siècle, les colons espagnols obligèrent d'abord les populations indigènes à travailler la terre. Ces populations indigènes ne survécurent pas aux conditions d'esclavage, les maladies européennes et le travail harassant les décimèrent. On commença alors à importer des Africains dans les colonies espagnoles, parce qu'ils étaient réputés mieux supporter le travail forcé dans le climat éprouvant des Caraïbes et de l'Amérique latine. Les points de prélèvement les plus fréquents sont le Sénégal et la Gambie (l'île de Gorée garde encore les traces de cette barbarie ) ; la Côte de l'Or et sa voisine la Côte des Esclaves (Ghana actuel plus Togo et Dahomey), l'estuaire du Niger, le Congo et l'Angola puis le Mozambique.

 

La traversée durait plusieurs mois. Les esclaves étaient enchaînés au-dessous du pont toute la journée et toute la nuit à part de brèves périodes d'exercices. Ils étaient entassés dans la saleté, la puanteur et la mort. En Amérique du Nord, les premiers esclaves africains furent débarqués à Jamestown (Virginie) en 1619. Emmenés par d'anciens corsaires britanniques, ils étaient soumis à l'esclavage limité, statut légal des Indiens d'Amérique, c'étaient les domestiques des blancs, dans pratiquement toutes les colonies anglaises du Nouveau Monde.

 

Le nombre d'esclaves importés n'étant pas très important au début, il n'apparut pas nécessaire de définir leur statut légal. Avec le développement du système de plantations dans les colonies du sud au cours de la seconde moitié du XVIIème siècle, le nombre d'Africains importés pour servir d'ouvriers agricoles augmenta considérablement et plusieurs villes côtières du Nord devinrent de grands ports négriers.

 

Dans l'ensemble, dans les colonies du Nord, les esclaves étaient utilisés à des tâches domestiques et dans le commerce, dans les colonies du centre ils étaient davantage utilisés dans l'agriculture, et dans les colonies du sud où dominait l'agriculture de plantations, presque tous les esclaves travaillaient dans celles-ci. Lorsque le rôle des esclaves africains s'accrut dans les colonies anglaises d'Amérique, en particulier dans le sud où il était fondamental pour l'économie et la société, les lois les concernant furent modifiées. Dès l'époque de la guerre de l'Indépendance américaine (1776-1783), ils n'étaient plus des serviteurs sous contrat mais des esclaves au sens propre du terme, des lois explicites à ce sujet définissant leur statut légal, politique et social vis-à-vis de leurs propriétaires.

 

Officiellement, les esclaves d'Amérique jouissaient de certains droits légaux, tels que le droit à une aide financière en cas de maladie ou de vieillesse, le droit à une instruction religieuse, le droit d'être représenté légalement et de participer à certains procès à titre de témoin. La coutume leur accordait également certains droits, comme le droit à la propriété privée, au mariage, au temps libre, droits que le propriétaire n'était cependant pas tenu de respecter. En réalité, les droits humains fondamentaux étaient le plus souvent bafoués. Les femmes esclaves étaient exposées en permanence au viol par leurs propriétaires et les familles étaient souvent disséminées, leurs membres étant vendus dans des plantations séparées. Les mauvais traitements comme la mutilation, les brûlures, l'enchaînement ou le meurtre, en théorie interdits par la loi, n'étaient pas choses rares jusqu'au XIXème siècle. Du XVIIème au XIXème siècle, on estime de 15 à 30 millions le nombre d'Africains déportés dans le Nouveau Monde par les Européens, avec l'appui des chefs locaux des royaumes africains. La condition des Noirs aux États-Unis fut marquée à jamais par cet épisode. La mortalité sur les bateaux atteignant sans doute 15 pour cent de la cargaison. Les esclaves des Antilles et de l'Amérique latine ont eu moins besoins de s'adapter que ceux du continent Nord américain.

 

Aux Antilles et en Amérique latine le nombre des esclaves dépassait largement celui des blancs. Il y eut des révoltes d'esclaves. La révolte la plus grande eu lieu à Saint Domingue (Haïti) en 1791. Presque 500 000 esclaves se sont rebellés contre leurs propriétaires français et ont repris le pays fondant ainsi le premier état noir indépendant.

 

Débat d'aujourd'hui

 

Le Comité pour la Mémoire de l'Esclavage souligne l'action de toutes les associations qui, dans l'outre-mer et en France métropolitaine, n'ont eu de cesse de faire connaître cette histoire et, qui, par leur action, ont poussé à sa reconnaissance et son inscription dans le récit national.

 

Le Comité pour la Mémoire de l'Esclavage rappelle l'héritage de l'esclavage. Souffrance de la déportation, de l'exil, de l'asservissement, mais également créativité qu'expriment les langues et les cultures créoles. Célébrons les apports des luttes des esclaves pour plus de justice, plus de liberté, et plus de démocratie. Ces apports appartiennent au patrimoine de l'humanité.

 

Le Comité pour la Mémoire de l'Esclavage rappelle enfin, conformément à son rapport, que, sans une valorisation de la recherche sur la traite négrière, l'esclavage et leurs abolitions, et sans un encouragement à la multiplication de supports pédagogiques sur ces thèmes, cette histoire restera mal connue.

Le Chef de l'État vient d'annoncer que la journée des « Mémoires de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions » sera désormais commémorée chaque 10 mai.

 

Jacques Chirac institue le 10 mai comme journée de commémoration de l'esclavage

 

PARIS (AP) - Parce que la mémoire de l'esclavage, "longtemps refoulée, doit entrer dans notre histoire", la journée du 10 mai lui sera désormais consacrée, et ce dès cette année, a annoncé lundi Jacques Chirac dans un discours très attendu alors que l'année 2005 a été marquée par la montée de la "question noire" en France.

Le chef de l'Etat a retenu la date déjà proposée en avril 2005 par le Comité pour la mémoire de l'esclavage, présidé par l'écrivain guadeloupéen Maryse Condé. Le 10 mai correspond à l'adoption définitive par le Parlement de la loi Taubira reconnaissant la traite et l'esclavage comme un crime contre l'humanité.

 

C'est l'aboutissement des luttes contre l'oubli et le silence, luttes commencées par les esclaves, les premiers abolitionnistes, et poursuivies par les mouvements antiesclavagistes. Puis, les populations de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion, des associations, des chercheurs, des élus, se sont mobilisés pour transmettre cette histoire.

 

Le Comité pour la Mémoire de l'Esclavage, institué par décret de janvier 2004 en application de la loi adoptée le 10 mai 2001 qualifiant la traite négrière et l'esclavage de crime contre l'humanité, se réjouit de la décision du Président de la République. Il se réjouit également que ses propositions concernant la recherche, l'enseignement et la culture, contenues dans son rapport remis le 12 avril 2004 au Premier Ministre aient été reprises par le Chef de l'État. Le Comité pour la Mémoire de l'Esclavage appelle à la fédération des énergies et à l'union des forces pour faire de chaque 10 mai une date symbolique forte. Dès demain, le Comité pour la Mémoire de l'Esclavage se réunira pour poursuivre son travail, et, conformément à sa mission, faire de nouvelles propositions.

 

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