Le commentaire " organisé "

I) Il suppose d'abord une lecture analytique du texte. Plusieurs niveaux sont possibles selon le type de texte :

1) le type de texte

Récit, argumentation, apologue, poésie, discours, théâtral : le mélange des genres est possible comme dans certaines fables. Le niveau de langage dépend du locuteur et du destinataire

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2) le contexte historique et littéraire

L'époque renvoie à des préoccupations précises : guerre, questions philosophiques, sociales, esthétiques, religieuses (ex : jansénisme, querelle des Anciens et des modernes, surréalisme….)

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3) la structure du texte

Montrer essentiellement comment l'idée ou l'impression initiale se transforme, évolue ; comparer le début et la fin. Un texte argumentatif peut utiliser des connecteurs logiques. Ne pas négliger l'organisation sur la page (les paragraphes et leurs tailles respectives)

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4) étude lexicale

Un ou plusieurs champs lexicaux doivent être répertoriés : ils donnent au texte sa continuité et sa tonalité. Il s'agit souvent d'une métaphore filée : observer ses modifications, ses connotations

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5) la syntaxe

Les phrases sont plus ou moins complexes, construites sur des verbes ou des noms. Les interrogations, exclamations servent à impliquer le lecteur. Les discours directs, indirects libres ou libres montrent justement le degré d'implication du narrateur et/ou mettent en valeur la situation d'énonciation, les pronoms également : qui parle et à qui ?Le système des temps structure un récit : imparfait duratif et répétitif, passé simple de l'action terminée, plus que parfait définitif, conditionnel évitant l'implication trop forte, passé composé du souvenir revisité, présent de narration, de vérité générale…

exemple 1

exemple 2

6) les figures

Tout procédé de style (métaphore, métonymie, gradation, hyperbole, chiasme, anaphore…) introduit un écart voulu avec le langage courant, il crée une nouvelle réalité qu'il vous faut découvrir. Il en ressortira toujours un ton particulier (ironie, émotion, tristesse,….)

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7) les rythmes et/ou la prosodie

Dans un poème traditionnel, le rythme provient de la régularité du vers, de la rime, des sons (allitérations et assonances). Toute irruption irrégulière est porteuse de sens : un rejet souligne volontairement un mot, une idée, une sensation.

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8) Les plans et les points de vue

Les plans (américains, italiens, d'ensemble…) expriment la vision de l'auteur ou des personnages : c'est le cadrage dans un film. Les points de vue font alterner la focalisation : interne, externe; du narrateur ou des personnages.

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II) Une présentation structurée qui s'appuie sur l'analyse préalable

1) Comment trouver cette structure ?

Premier " truc " : se servir de l'évolution du ou des champs lexicaux ou comment la réalité se transforme progressivement.

Deuxième " truc " : utiliser les pré-supposés contenus dans les questions (sans négliger l'analyse détaillée), ceux qui les ont formulées avaient certainement en tête une vision générale du texte.

Troisième approche : regrouper les remarques (numérotées ou simplifiées) du I dans un tableau à triple entrée : elles devraient vous donner 2 ou 3 axes de réflexion -à défaut d'un plan !

Quatrième approche : très souvent, un texte commence par une notation concrète qui se retrouve amplifiée, modifiée. Il s'agit alors de montrer les étapes de cette transformation.

Approches à éviter : chercher des thèmes qui vous pousseront à la paraphrase et plaquer une idée préconçue sur le texte (le souvenir d'un cours sur l'auteur ou sur un mouvement littéraire par exemple)

De toute façon, penser au MESSAGE que l'auteur veut délivrer et aux MOYENS qu'il met en oeuvre.

2) Introduire

exemple 1 : Ce poème de Marie Noël se présente sous la forme d'une chanson dont il comporte les refrains et les vers courts (décasyllabes ou octosyllabes). Sous une forme simple et pudique, il décrit une rencontre amoureuse au début du siècle.

Nous étudierons sa composition en nous attachant à mettre en valeur l'impression de simplicité ressentie à la lecture

exemple 2 : Le Dormeur du val est un des premiers poèmes de Rimbaud. Il a environ seize ans lorsqu’il fugue pour la deuxième fois du domicile parental de Charleville Il recopie vingt-deux textes dans un cahier qu’il confie à son ami Paul Demeny, poète également. Le Dormeur du val en fait partie, écrit pendant son errance d’octobre 1870, en pleine guerre franco-prussienne

L’année suivante, il demandera à son ami de le détruire avec les autres quand il refusera tout romantisme, toute subjectivité, tout culte de la forme.

En effet, par bien des aspects, ce poème contient encore pleins de réminiscences scolaires et utilise la forme du sonnet selon la disposition abab-cdcd-eef-ggf, proche des sonnets shakespeariens. Mais par le thème choisi, le ton adopté et quelques audaces de forme, il annonce une vision neuve de la poésie.

J’ai choisi de ne pas séparer les caractéristiques formelles et structurelles du poème de ses centres d’intérêts car tous les éléments de la description et de la construction concourent à la révélation brutale du dénouement.

exemple 3 : Dans ces premières pages du roman de Patrick Süßkind, Le Parfum, nous assistons à une description inhabituelle en littérature. En effet, le narrateur choisit le champ lexical de l'odorat , sens peu sollicité ordinairement. Il traite du "royaume évanescent des odeurs" pour mettre en condition le lecteur. Mais il s'agit des mauvaises odeurs dans un livre censé parler de parfum.

Nous nous poserons le problème de l'intérêt romanesque du thème en étudiant la composition du passage et les procédés utilisés.

exemple 4 : Dans cette avant-dernière scène de l'Acte II du Fil à la patte, de George Feydeau, Lucette Gautier, chanteuse de café-concert, abandonnée pour une riche héritière, tente un dernier stratagème. Elle veut faire échouer le mariage de son amant, Fernand de Bois d'Enghien avec Viviane du Verger.

Au point de vue théâtral, cette scène est particulièrement intéressante puisqu'on y retrouve face à face les deux principaux personnages. C'est l'épreuve de vérité. Ils expriment leur personnalité dans les dialogues, les apartés, des geste au cours d'une mise en scène très soignée.

3) Conclure

Marie Noël transpose donc en poésie une rencontre amoureuse, certainement autobiographique. Elle n'utilise pas les mots et les clichés habituels. Pas d'amour avec un grand A, pas d'envolée romantique, simplement la description d'une scène presque banale mais intensément vécue. Nous nous souviendrons du contraste entre la monotonie du moment précédent la rencontre et la fébrilité qui gagne tous ses gestes quand le jeune homme entre dans la pièce. Le refrain souligne volontairement ce changement de comportement avec le recul et l'attendrissement du souvenir.

Le Dormeur du val, dans un ton d’amertume ironique analogue à celui du Mal (page 51 de ce recueil) est à la recherche d’un rythme neuf qui démembre l’alexandrin à force de rejets, contre-rejets et de ponctuations fortes (points, points virgules, deux points au milieu du vers).

Comme d’autres poèmes de cette époque, il utilise le rendu d’impressions lumineuses et de couleurs symboliques.

Rimbaud ne mettra que peu de temps à se libérer des contraintes du mètre et des thèmes habituels de la poésie. Il exploitera dés l’année suivante le poème en prose et les visions oniriques ou symboliques.

Le tout est prestement enlevé, avec le recours aux discours direct et indirect libre qui nous met de plein-pied avec la réalité. Les circonstances de cette naissance baignée dans les odeurs et un tragique quotidien conditionnent certainement le reste du roman. Le parfum semblera une nécessité, l'envers du décor et le fil conducteur du récit.

A l'issue de la scène, Lucette semble avoir gagné la première manche. Mais le spectateur sait maintenant que ni l'un ni l'autre ne sont véritablement amoureux. Il s'agit plutôt de deux amours-propres qui s'affrontent dans une logique plus théâtrale que sentimentale. Le ressort du Boulevard n'est pas la sincérité mais le plaisir du spectateur.

III) Présentation du devoir

INTRODUCTION :

-rappel de l'auteur, du titre, de la situation dans le livre/recueil/pièce (deux phrases)
-intérêt du passage (une phrase)

-annonce du plan ou de la problématique choisie.

- retrait d'alinéa au début et saut de ligne comme pour chaque partie et pour la conclusion.(I, II, III)

-retrait plus court et retour à la ligne entre chaque sous-partie.(A, B, C)

exemple de PLAN au brouillon : (en 2 parties ici, 3 possibles) sur La manifestation dans Germinal

I Une foule en colère : évolution du champ lexical

II Des points de vue multiples sur cette foule

Conclusion

A) une foule de mineurs

A) celui des "bourgeois"

Elle se contente de résumer les points essentiels du plan sans ajouter de nouvelles analyses.

B) qui deviennent des "bêtes fauves"

B) celui d'un peintre

Une ouverture reste cependant possible si elle se justifie : notamment en ce qui concerne l'intérêt dramatique de l'extrait (suite du récit),

C) puis de dangereux révolutionnaires

C) celui du narrateur

ou sa place dans l'œuvre de l'auteur, ou dans un mouvement littéraire, dans une nouvelle esthétique.

 

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