La violence est partie intégrante de notre monde, de l'Histoire.// Les livres racontent jusqu'à l'écœurement une succession de batailles, de massacres, de dates souvent fondatrices d'une nation. Le temps historique apparaît par excellence celui de la violence, une manière de gérer la durée par l'opposition des hommes et des états.

 

Au XXème siècle, on semble déceler une augmentation récente de la violence, surtout celle contre les biens. Tout au moins si on en croit nos yeux et nos oreilles, c'est à dire une violence que l'on pourrait qualifier de médiatique.

 

Il faut cependant distinguer violence réelle et violence perçue. Les médias privilégient en effet une approche spectaculaire du phénomène. L'écran ne montre que la surface des événements, l'écume de l'histoire et non l'histoire elle-même. Nous sommes victimes d'un effet d'optique car cet écran n'est que le petit bout de la lorgnette.

 

La violence réelle se cacherait plutôt dans la vie quotidienne, habilement dissimulée ou simplement omise par le système qui la produit. Par exemple, la violence automobile, issue d'une industrie qui génère plus de deux millions d'emplois en France est relativement bien tolérée tant qu'elle ne touche que les autres et ne dépasse pas certaines limites (chauffards défiant l'Alcootest ou poids lourds meurtriers).

 

L'hécatombe annuelle ne choque presque pas par une sorte d'accord tacite.

 

C'est que la violence renvoie à une société donnée dans un moment de son histoire. Qui se souciait des mineurs avant le Germinal d'Émile Zola ou de l'antisémitisme avant l'affaire Dreyfus ? Toute société à la violence qu'elle peut supporter, par hypocrisie ou par intérêt. Seuls n'émergent que les "accidents", la partie supérieure de l'iceberg, car rien ne doit entraver le fonctionnement du système économique.

 

Les médias ne reflètent donc que des faits apparemment non-significatifs, infiniment moins dangereux socialement que la violence réelle. Ils produisent un leurre, un miroir aux alouettes qui attire le regard, provoque une peur de bon aloi mais sans rapport direct avec les rapports de force qui sous-tendent la société. C'est que cette violence cachée est nécessaire ou tout au moins liée à son bon fonctionnement.

 

Quand la pression est trop forte, le système en "dysfonctionnement", certaines sociétés projettent la violence qu'on ne peut plus cacher sur des boucs émissaires : les juifs hier, les étrangers aujourd'hui.

 

Les médias jouent alors le rôle de l'inconscient humain : ils ne laissent remonter à la surface que des lambeaux de vérité, un kaléidoscopes d'images provocantes mais sans explication véritable. La charge émotionnelle s'exprime sans contrôle de la raison. La plupart des hommes préfèrent "naturellement" la facilité et le confort moral. La profondeur est perçue comme dangereuse.

 

Les médias accentuent cette tendance en montrant la violence comme anormalité alors qu'elle fait partie de notre destin social et mortel. La mort habituelle, non spectaculaire, est soigneusement gommée des sociétés modernes, réservée aux hôpitaux et aux pompes funèbres.

 

Ce comportement n'est pas totalement négatif. Il provoque, comme la tragédie classique, une catharsis, une purge des passions. Sous le vernis de la civilisation peuvent s'exprimer des instincts toujours en éveil, sens du territoire, instinct de survie ou de puissance impossibles à révéler dans la vie réelle.

 

Cependant, une focalisation horizontale de la violence donne une double illusion : la violence c'est les autres et les autres sont ailleurs, en dehors de mon champ d'intervention. Une guerre civile en Afrique masque l'enfant battu par le voisin de palier.

 

Plus que jamais, malgré une vie bien meilleure que dans le passé, le citoyen actuel se doit de rester vigilant. La violence est un héritage génétique qu'il faut comprendre et assumer pour mieux la contrer.

 

1) Quels sont les types d’arguments utilisés dans les phrases soulignées ?

2) Faites le plan du texte avec titres et sous-titres.