Commentaire proposé par Eddie Saintot
Les
femmes sont en tête de la manifestation parce qu’elles sont à la
recherche de nourriture pour leurs enfants. Comme dans beaucoup de
conflits, leur motivation et leur ténacité est plus forte. Les
soldats hésiteront à tirer sur elles. Le
plus-que-parfait marque l’antériorité d’une action passée par
rapport à une autre. Celle-ci est terminée, donc les femmes
apparaissent brusquement, sans que les bourgeois les aient vues arriver.
Parurent ou paraissaient seraient déplacés dans ce contexte. Ces
détails renvoient au champ lexical de l’animalité. Une femme sans
chapeau ou foulard au milieu du XIXème siècle s’apparentait à une
prostituée ou une »danseuse ». « femelles
lasses d’enfanter des meurt-de-faim » : Les sifflantes
accentuent les cris des femmes.
L’adjectif
« petit » renvoie lui aussi au champ lexical de l’animalité.
C’est également le niveau de langage des femmes pour désigner des
nourrissons. La
gradation évolue vers le drapeau. Le mot annonce le champ lexical de la
révolution. Toutes
ces consonnes dures montrent l’agressivité des femmes en fonction de
leur âge. « gorges
gonflées de guerrières » Tous
les mineurs manifestent : donc, Zola
montre leur unanimité en citant leur fonction précises dans la
mine. (point de vue du narrateur omniscient). La foule paraît
d’autant plus importante. Les
passés simples marquent la rapidité, la soudaineté de l’action. Le
verbe débouler est un terme de chasse (cynégétique) qui s’utilise
pour le gibier. Le
champ lexical de la foule gomme toute
individualité aux hommes et les compare encore à des animaux. Une
foule est plus forte que les éléments qui la composent. « tricots de laine en loques » l’alternance des consonnes ressemblent à l’alternance de la peau et du tissu. Les
métonymies réduisent les mineurs à un cri et à un regard (les trous
des bouches noires) Les
deux champs lexicaux de l’animalité et de la révolution se mélangent
dans la même phrase, car cette révolte de la faim peut se transformer
en Révolution. Notons que Zola glisse quelques mots extraits de la
Marseillaise comme « mugissement », et « étendard ». « Une
hache passa ». Les sifflantes imitent le son produit par le
couperet. Le passé simple souligne la rapidité du mouvement. Assonances :
voyelles fermées o rose, a, pâte, e, eu,
ouvertes
o, port, a pattes, eu , bonh(eur)
claires,
i, u, ais, ait, è, ê
nasales ou, on, a, in, un Les
assonances attirent l’attention sur les mots car la langue française
déteste le hiatus et la cacophonie. Les
bourgeois sont individualisés : le narrateur donne leur nom. Il ne
faut pas oublier qu’ils sont cachés derrière une porte de grange et
qu’ils se sentent en danger. Ce sont
deux mondes opposés, l’incompréhension reste totale. Il
s’agit plus d’un tableau que de la réalité. Le rouge domine. Nous
sommes en présence d’un « vision » de Zola, peut-être
une vision prophétique. Chaque
personnage se recule ou s’avance en fonction de son courage ou de sa
fascination pour la scène. « belle
horreur » = l’oxymore (féminin), oxymoron (masculin). Une antithèse en
deux mots. Elle crée une sorte de raccourci saisissant, un troisième
sens poétique. Le
conditionnel présent met en valeur un avenir possible. Zola veut faire
peur aux bourgeois sans toutefois envisager cet avenir comme certain. Le
« oui » fait partie du discours du narrateur. Il s’est
laissé emporté par son ardeur. L’accumulation
finale produit un effet de réel (le vraisemblable) dans le style un peu
démesuré propre à Zola. Le slogan final revient tout au long du chapitre : il résume à lui seul les raisons du comportement des mineurs. Ils ne veulent pas d’une révolution. Le cri domine d’ailleurs la Marseillaise.
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