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SESSION 2003

S U J E T

B.E.P. Alimentation - Bioservices - Carrières Sanitaires

et sociales - Toutes spécialités industrielles

Code :

ÉPREUVE : Français

Durée : 2 h 00

 

L’usage de la calculatrice et du dictionnaire n’est pas autorisé

 

TEXTES

 

Extrait A

 

Je traversais ce pays dans sa plus grande largeur et, après trois jours. de marche, je me trouvais dans une désolation sans exemple. Je campais à côté d'un squelette de village abandonné. Je n'avais plus d'eau depuis la veille et il me fallait en trouver. Ces maisons agglomérées, quoique en ruine, comme un vieux nid de guêpes, me firent penser qu'il avait dû y avoir là, dans le temps, une fontaine ou un puits. Il y avait bien une fontaine, mais sèche. Les cinq à six maisons sans toitures, rongées de vent et de pluie, la petite chapelle au clocher écroulé, étaient rangées comme le sont les maisons et les chapelles dans les villages vivants, mais toute vie avait disparu.

C'était un beau jour de juin avec grand soleil, mais, sur ces terres sans abri et hautes dans le ciel, le vent soufflait avec une brutalité insupportable. Ses grondements dans les carcasses des maisons étaient ceux d'un fauve dérangé dans son repas.

Il me fallut lever le camp. À cinq heures de marche de là, je n'avais toujours pas trouvé d'eau et rien ne pouvait me donner l'espoir d'en trouver. C'était partout la même sécheresse, les mêmes herbes ligneuses (1). Il me sembla apercevoir dans le lointain une petite silhouette noire, debout. Je la pris pour le tronc d'un arbre solitaire. À tout hasard, je me dirigeai vers elle. C'était un berger. Une trentaine de moutons couchés sur la terre brûlante se reposaient près de lui.

Il me fit boire à sa gourde et un peu plus tard il me conduisit à sa bergerie, dans une ondulation du plateau. Il tirait son eau - excellente - d'un trou naturel, très profond, au-dessus duquel il avait installé un treuil rudimentaire.

Cet homme parlait peu. C'est le fait des solitaires, mais on le sentait sûr de lui, et confiant dans cette assurance. C'était insolite dans ce pays dépouillé de tout. Il n'habitait pas une cabane mais une vraie maison en pierre où l'on voyait très bien comment son travail personnel avait rapiécé la ruine qu'il avait trouvée là à son arrivée. Son toit était solide et étanche. Le vent qui le frappait faisait sur les tuiles le bruit de la mer sur les plages.

Son ménage était en ordre, sa vaisselle lavée, son parquet balayé, son fusil graissé ; sa soupe bouillait sur le feu je remarquai alors qu'il était aussi rasé de frais, que tous ses boutons étaient solidement cousus, que ses vêtements étaient reprisés avec le soin minutieux qui rend les reprises invisibles.

Il me fit partager sa soupe et, comme après je lui offrais ma blague à tabac, il me dit qu'il ne fumait pas. Son chien, silencieux comme lui, était bienveillant, sans bassesse.

 

Extrait B - (fin de la nouvelle)

 

Sur l’emplacement des ruines que j’ avais vues en 1913, s'élèvent maintenant des fermes propres, bien crépies, qui dénotent une vie heureuse et confortable. Les vieilles sources, alimentées par les pluies et les neiges que retiennent les forêts, se sont remises à couler. On en a canalisé les eaux. À côté de chaque ferme, dans des bosquets d'érables, les bassins des fontaines débordent sur des tapis de menthes fraîches. Les villages se sont reconstruits peu à peu. Une population venue des plaines où la terre se vend cher s'est fixée dans le pays, y apportant de la jeunesse, du mouvement, de l'esprit d'aventure. On rencontre dans les chemins des hommes et des femmes bien nourris, des garçons et des filles qui savent rire et ont repris goût aux fêtes campagnardes. Si on compte l'ancienne population, méconnaissable depuis qu'elle vit avec douceur et les nouveaux venus, plus de dix mille personnes doivent leur bonheur à Elzéard Bouffer.

Quand je réfléchis qu'un homme seul, réduit à ses simples ressources physiques et morales, a suffi pour faire (2)

surgir du désert ce pays de Chanaan , je trouve que, malgré tout, la condition humaine est admirable. Mais, quand je fais le compte de tout ce qu'il a fallu de constance dans la grandeur d'âme et d'acharnement dans la générosité pour obtenir ce résultat, je suis pris d'un immense respect pour ce vieux paysan sans culture qui a su mener à bien cette oeuvre digne de Dieu.

Elzéard Bouffier est mort paisiblement en 1947 à l'hospice de Banon.

 

Jean GIONO, L'homme qui plantait des arbres, éditions Gallimard,

Écrit en 1953, 1ère édition en France en 1973.

 

(1) herbes ayant l'aspect du bois

(2) terre promise terre de toutes les richesses

 

Document :

 

Extrait de la jaquette vidéo du film d'animation de Frédéric Back, 1987, Radio Canada.

 

Dans cette région désertique aux confins des Alpes et de la

Provence,

un voyageur s'est égaré...

Il rencontre un berger silencieux, Elzéar Bouffier, qui lui offre l'hospitalité.

Elzéar est habité d'une étrange sérénité, qu'il offre en partage à son hôte.

Cette tranquillité, le berger la doit à cette tâche qu'il s'est assignée

et que rien ne semble pouvoir interrompre :

planter des arbres sur des hauteurs où plus rien ne pousse depuis

des décennies,

Ni les intempéries, ni les querelles guerrières des hommes n'arrêteront

Elzéar Bouffier dans sa quête : en trois ans, il a déjà planté cent mille

chênes;

en trente ans, il en aura planté tant que ceux-là seront comme une goutte

d'eau

dans un océan.

Grâce à son grand oeuvre, à mesure que les arbres poussent, l'eau se

remet à couler

dans les sources taries et les animaux et les humains reviennent peupler

ces paysages.

Jusqu'à la fin de ses jours, Elzéar Bouffier continuera son oeuvre

anonyme, miraculeuse, qui redonnera vie à son pays...

 

 

QUESTIONS

 

Toutes les réponses doivent être rédigées

 

COMPÉTENCES DE LECTURE - 10 points

Textes (Extraits A et B)

  1. Quarante ans séparent la description du village et du paysage de l'extrait A et celle de l’extrait B. 3 pts

Quels changements dans l'atmosphère remarquez-vous ? Relevez, dans chaque extrait, un champ lexical

justifiant votre réponse.

Document :

2. À qui doit-on ces transformations ? Par quelle action s'accomplissent-elles et avec quels objectifs ? 9; 3 pts

Document et textes (Extraits A et B)

3. En observant son portrait, sa manière de vivre, ses occupations, quels traits de caractère dominants 4pts expliquent l'oeuvre du personnage ? Justifiez votre réponse.

COMPÉTENCES D'ÉCRITURE - 10 points

 

Comme Elzéard Bouffier, certaines personnes forcent l'admiration par leur engagement désintéressé, au service d'une cause humanitaire ou écologique.

Dans le journal du lycée, vous rédigez un article, d'environ 25 lignes, afin de faire partager votre admiration pour l'engagement d'une personne (ou association) inconnue ou célèbre.

Vous présenterez cette personne (ou association), son action et les raisons précises entraînant votre respect et votre admiration. Afin de respecter l'anonymat, vous ne signerez pas votre article.

 

(La qualité de l'orthographe, de la syntaxe et de la grammaire sera prise en compte dans la limite de trois points).

 

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