SUJET BEP FRANÇAIS Carrières Sanitaires&Sociales 2002 REIMS

 

TEXTE 1

 

LE LOUP ET LE CHIEN

 

Un loup n'avait que les os et la peau,

Tant les chiens faisaient bonne garde.

Ce loup rencontre un dogue (1) aussi puissant que beau,

Gras, poli, qui s'était fourvoyé (2) par mégarde.

L'attaquer, le mettre en quartiers,

Sire loup l'eût fait volontiers.

Mais il fallait livrer bataille;

Et le mâtin était de taille

À se défendre hardiment.

Le loup donc l'aborde humblement,

Entre en propos, et lui fait compliment

Sur son embonpoint qu'il admire.

Il ne tiendra qu'à vous, beau sire,

D'être aussi gras que moi, lui repartit le chien.

Quittez les bois, vous ferez bien

Vos pareils y sont misérables,

Cancres, hères, et pauvres diables (3),

Dont la condition est de mourir de faim.

Car quoi ? Rien d'assuré ; point de franche lippée (4)

Tout à la pointe de l'épée.

Suivez-moi : vous aurez un bien meilleur destin. »

Le loup reprit : « Que me faudra-t-il faire ?

- Presque rien, dit le chien, donner la chasse aux gens

Portant bâtons et mendiants ;

Flatter ceux du logis, à son maître complaire ;

Moyennant quoi votre salaire

Sera force reliefs (5) de toutes les façons

Os de poulets, os de pigeons ;

Sans parler de mainte caresse. »

Le loup déjà se forge une félicité (6)

Qui le fait pleurer de tendresse.

Chemin faisant il vit le col (7) du chien pelé.

Qu'est-ce là ? lui dit-il.

- Rien. - Quoi rien ? - Peu de chose.

- Mais encor ? - Le collier dont je suis attaché

De ce que vous voyez est peut-être la cause.

- Attaché ? dit le loup; vous ne courez donc pas

Où vous voulez ? - Pas toujours, mais qu'importe ?

- Il importe si bien que de tous vos repas

Je ne veux en aucune sorte,

Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor. »

Cela dit, maître loup s'enfuit, et court encor.

 

Jean de La Fontaine, Fables, Livre 1, 5,1668

 

(1) Dogue, mâtin : gros chien.

(2) Fourvoyé : perdu.

(3) Cancres, hères, pauvres diables : personnes misérables.

(4) Franche lippée : bon repas qui ne coûte rien.

(5) Force reliefs : beaucoup de restes de repas.

(6) Se forge une félicité : s'imagine déjà son bonheur.

(7) Col : cou.

 

TEXTE 2

 

[...] Et si j'étais animal, je ne voudrais pas être bête de maison ou de ferme, pas même la chèvre qu'on attache au piquet et qu'on rentre dans une étable pour la traire, ni une de ces poules dans la basse-cour, toutes mêlées aux marchés de l'homme et qui peuvent se dire l'une à l'autre quand elles ont pondu un œuf : « C'est quinze sous que j'ai fait là et je vaux dix francs la livre »... Non ! Non ! J'aimerais mieux être lièvre, ou renard, ou biche, ou rossignol qui ne rencontrent l'homme jamais que le jour où il les tue.

Et j'aurai été toute ma vie animal des plus domestiques, bête de somme, chien attaché, serin en cage.

 

Marie Noël, Notes intimes, Paris, éditions Stock, 1995

 


 

QUESTIONS

 

Toutes les réponses doivent être rédigées.

 

COMPÉTENCES DE LECTURE - 10 points

 

TEXTE 1

1. a) Faites le portrait physique de chaque animal.

    b) Quelle est la vie menée par chacun d'eux ? (3 points)

2. a) Quelles sont les deux réactions successives du loup aux propos du chien ? (2 points)

    b) Quel élément provoque le changement d'attitude du loup ? Relevez le vers qui l'exprime. (2 points)

 

TEXTES 1 ET 2

3. Lorsqu'elle évoque la vie qu'elle aurait aimé mener, Marie Noël vous paraît-elle plus proche du loup ou du chien ? Justifiez votre réponse. (3 points)

 

COMPÉTENCES D'ÉCRITURE - 10 points

 

Un de vos amis envisage de quitter l'école et de partir vivre en marge de la société. Il essaie de vous convaincre de le suivre, mais vous n'êtes pas d'accord avec son choix.

Écrivez ce dialogue en une trentaine de lignes.

(La qualité de l'orthographe, de la syntaxe et de la grammaire sera prise en compte dans la limite de trois points).

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