Mon  âme a son secret , ma vie a son mystère,

Un amour éternel en un moment conçu :

Le mal est sans espoir, aussi j’ai dû  le taire,

Et celle qui l’a fait n’en a jamais rien su .

 

Hélas ! j’aurai passé près d’elle inaperçu,

Toujours à ces côtés, et pourtant solitaire,

Et j’aurai jusqu’au bout fait mon temps sur la terre,

N’osant rien demander et n’ayant rien reçu .

 

Pour elle, quoique Dieu l’ai faite douce et tendre,

Elle suit son chemin, distraite et sans entendre

Ce murmure d’amour élevé sur ses pas .

 

A l’austère devoir, pieusement fidèle,

Elle dira, lisant ces vers tout remplis d’elle :

« Quelle est donc cette femme ? » et ne comprendra pas .

 

Félix Arvers, Mes heures perdues, 1830