Commémoration et mémoire collective

 

Vous proposerez une synthèse objective, ordonnée et concise des documents qui suivent. Vous serez particulièrement attentif à la nécessité pour les sociétés actuelles de commémorer leur passé et aux ambiguïtés sur lesquelles repose ce besoin de commémoration. Votre travail de synthèse sera suivi d'une conclusion où vous énoncerez avec précision votre avis sur ce problème.

 

Documents joints :

  • Document 1 : Michel Guerrin, « joyeux désordre sur les Champs-Élysées », Le Monde, 28-29 août 1994.

  • Document 2: Philippe Raynaud, L’Entreprise commémorative,  « La commémoration : illusion ou artifice ? », Le Débat, numéro 78,  janvier-février 1994.

  • Document 3: Thomas Ferenczi, « Les jeux ambigus de la mémoire »,  Le Monde, 28-29 août 1994.

  • Document 4: Article « Mémoire collective » (extrait), extrait de  l'Encyclopaedia Universalis.

  • Document 5 : Primo Levi, La Mémoire de l'offense, 1986, Le Serpent à  plumes, mars 1993.

 

DOCUMENT 1

     Joyeux désordre sur les Champs-Élysées

 

Le 50ème anniversaire de l’insurrection de la capitale

 

Joyeux désordre sur les Champs-Élysées

 

« Ah! C'est la mer! Si loin que porte ma vue, ce n'est qu'une houle vivante, dans le soleil, sous le tricolore », écrivait Charles de Gaulle, dans ses Mémoires de guerre. Le 26 août 1944, le général descendait à pied les Champs-Élysées où s'était massée une foule délirante de deux millions de personnes.

 

Cinquante ans après, le metteur en scène Dominique Menut a présenté sur la même avenue, le vendredi 26 août, le spectacle « Libération, j'écris ton nom ». Après la reconstitution « réaliste-patriotique » de la veille à l'Hôtel de Ville (Le Monde du 27 août), on pouvait s'attendre à un spectacle plus audacieux, où la poésie et le rêve auraient leur place à côté du souvenir. La France possède d'ailleurs une belle réputation dans ce type de manifestations de plein air, où il faut à la fois satisfaire le badaud et le téléspectateur - de la célébration du bicentenaire de la Révolution française par Jean-Paul Goude, en 1989, à la cérémonie d'ouverture des jeux Olympiques d'Albertville par Philippe Decouflé, en 1992. Et on devait à Dominique Menut « la Grande Moisson » de 1990 : à la demande du Centre national des jeunes agriculteurs, les Champs-Élysées avaient été transformés en un immense champ de blé que des moissonneuses-batteuses avaient fauché. L’entreprise ne manquait pas d'allure.

 

Avec « Libération, j'écris ton nom », le metteur en scène Dominique Menut et le peintre Julius Baltazar faisaient référence au général de Gaulle, mais aussi au célèbre poème de Paul Éluard. Ils voulaient donc donner l'impression de vagues libres et tourbillonnantes, de flux et de reflux, de désordre joyeux. De fraîcheur retrouvée. Peu après 18 heures - la flamme du soldat inconnu ranimée - 6 000 jeunes de dix à vingt ans, en tee-shirt et short blancs, surgissent donc de la place de l'Étoile et s'engouffrent dans l'avenue, jonglant entre les étranges plots de béton ronds ou pyramidaux qui ponctuent l'artère.

 

Les jeunes et les anciens

 

Les jeunes gens brandissent des cannes de bambou où s'accrochent cerfs-volants, oriflammes, draps de nylon bleus, blancs, rouges et jaunes, sur lesquels, comme pour figurer l'écume, Julius Baltazar avait « jeté » des taches de couleur. Certains figurants étaient « portés » par des grappes de ballons accrochés à leurs vêtements, d'autres, sur les côtés, agitaient de drôles de voiles blanches fixées à un mât. Les gamins couraient, marchaient, viraient, se tamponnaient, reculaient. « C'est la mer à Paris, avec ses coquilles nacrées d'huîtres ! », lâchait Julius Baltazar. « C'est le bordel ! », lui répondait en écho un spectateur désorienté. C'est vrai qu'on ne savait où donner du regard dans cette marée désordonnée et sympathique où les visages se mêlaient aux drapeaux, où l'on remarquait nombre de « beurs » et de « blacks ».

 

Les groupes, venus de tous les coins de France, semblaient heureux. « Tous les jeunes qui se révoltent dans les banlieues, qui descendent dans la rue, qui ont manifesté contre le CIP, sont là », affirmait Dominique Menut. L’idée était séduisante : la banlieue qui monte à l'assaut des Champs-Élysées.

 

Le public était plus réservé et moins nombreux, semble-t-il (autour de 30 000 personnes), que la veille entre l'Hôtel de Ville et la place de la Concorde. Comme si chacun savait désormais que ce genre de spectacle est d'abord conçu pour la télévision. Et qu'il valait mieux rester branché sur France 2. Car « Libération, j'écris ton nom » n'a d'intérêt que pour sa vision d'ensemble, son effet de masse et de couleurs. Seule une caméra qui surplombe la scène pouvait saisir l'ampleur de ces 6 000 jeunes descendant l'avenue drapeau au poing. Au ras du pavé, l’œil a du mal à capter les groupes, il ne saisit que des détails sans importance et ne voit pas la chorégraphie. Quant à la musique - signée Maurice Jarre -, elle est transparente et passe-partout.

 

Après avoir planté leurs drapeaux, voiles, cerfs-volants dans les plots de béton, les 6 000 jeunes ont reflué vers l'Arc de triomphe, emmenés par des personnages juchés sur des échasses. En musique de fond, l'air sifflé du Chant des partisans. Reste cette mer de nylon multicolore, maintenant assagie, qui flottait au-dessus des Champs-Élysées. « Quand les enfants seront partis, les Champs seront à vous ! », annoncent les haut-parleurs. Désillusion : pour des raisons de sécurité, la masse de drapeaux restera inaccessible à l'abri de barrières et d'un cordon de policiers. « Drôle de conception de la liberté ! », hurlaient nombre de badauds qui s'étaient déplacés pour déambuler sur l'avenue, et toucher ces « sculptures animées ».

 

La plus belle image restera, sous un soleil retrouvé, le lâcher des ballons multicolores qui étaient accrochés aux embarcations et aux voiles. Au même moment, des anciens résistants, médailles sur le cœur, calot sur la tête, droits comme des I, ont remonté lentement les Champs en saluant et faisant le V de la victoire. Scène prévue ? Probablement pas. Mais la foule, émue, massée contre les barrières, retrouvait enfin le sens de cette journée.

 

Michel Guerrin, Le Monde, 28-29 août 1994.

 

DOCUMENT 2

     L’entreprise commémorative

 

Les commémorations n'ont pas pour unique visée d'affirmer  l'existence d'une unité politique : elles travaillent aussi à la produire. L’identité proclamée, dont on a reconstruit l'histoire à travers les dates  symboliques choisies, doit être effectivement inscrite dans le corps social  par une stratégie de la mémoire qui tend à donner à cette identité la continuité temporelle - par laquelle le passé, qu'on a réinstruit à la  lumière des valeurs du présent, deviendra garant de l'avenir souhaité. Les cérémonies commémoratives revêtiront donc l'aspect d'une pédagogie. L’impératif de transmettre le souvenir est parfois ressenti par les contemporains de l'événement qui deviendra objet de la commémoration. On sait qu’en France les premières cérémonies en l'honneur des morts de la Grande Guerre ont été le fait de combattants, et cela avant même l'armistice ; l'impératif de ne pas oublier s'est imposé aux acteurs eux-mêmes et si les institutions politiques (en l'occurrence les communes, avec l'aide de  l'État) ont développé un ample programme de construction de monuments aux morts, ce sont encore les combattants qui ont organisé les premières célébrations et imposé, en 1922, la reconnaissance du 11 Novembre comme fête officielle. Ces cérémonies ont revêtu un aspect pédagogique marqué, avec un message dont on doit souligner, à la suite d’Antoine Prost,  la complexité et la conformité aux principes républicains : l'exemple des  soldats tombés devait inculquer aux écoliers la rude morale du devoir,  mais la patrie témoignait aux défunts sa gratitude pour un sacrifice considéré comme librement consenti. L’esprit des cérémonies n'était  point belliciste : en même temps que la victoire, c'est la paix que l'on  célébrait, avec l'intention de la consolider.

 

Dans un cas de ce type, l'événement impose sa commémoration  à ses propres contemporains : on pourrait dire qu'il se transforme immédiatement en souvenir qu'il faut transmettre. Plus étrange est le cas où l'événement est séparé par un certain temps du moment où s'impose à l'esprit public la nécessité de le commémorer. C'est ainsi que les juifs de  France, victimes de l'extermination hitlérienne, ont pu sembler, jusque dans les années 1970, menacés d'un relatif oubli, dont émergent très peu de rappels spécifiques (exception faite, dans une certaine mesure, du mémorial de la Déportation à Paris), jusqu'à ce que leur souvenir  s'impose, tardivement, mais irrésistiblement.

 

Il peut enfin arriver qu'une opération de nature plus volontariste aille chercher dans le passé un événement susceptible de satisfaire à la nécessité présente de répandre un certain message. La continuité de la mémoire n'est pas ici donnée mais décrétée, avec une dimension instrumentale plus marquée : c'est ainsi, par exemple, que les grandes figures de l'histoire prérévolutionnaire ont pu être convoquées pour nourrir le patriotisme russe pendant la Seconde Guerre mondiale. Paradoxe de cette mémoire : les événements fondateurs, que le souvenir veut inscrire dans la permanence, manifestent, par la pluralité conflictuelle des significations qu'on leur attribue, leur relativité aux exigences du présent.  Ainsi a-t-on pu, dans le cas exceptionnel d'une nation divisée en deux  États, mesurer la différence qui peut exister entre les divers modes d'appropriation du passé à l'occasion du millénaire de la Prusse. Cet événement  a fourni, en Allemagne fédérale, l'occasion de souligner les promesses démocratiques contenues dans une histoire brutalement interrompue  par le national-socialisme ; par-delà cette rupture, on a cherché à renouer  avec une Prusse présentée comme le pays des Lumières : on n'a pas  manqué ainsi de rappeler que le Land prussien avait connu le dernier gouvernement social-démocrate, illégalement dissous par la dictature. L’interprétation de la RDA tendait, au contraire, à imputer à l'Ouest  l'héritage de tout le négatif de l'histoire allemande, de l'autoritarisme  bismarckien au nazisme, en s'appropriant la figure de Frédéric II et même la Réforme luthérienne.

 

L’entreprise commémorative apparaît donc paradoxale. Tendant  à reconstruire la diversité des expériences dans l'unité d'une identité politique, elle doit poser des événements fondateurs de cette unité, et les  placer au-dessus de toute érosion par le temps. Mais cette opération  suppose une dimension impossible à éliminer de construction et d'interprétation, par où s'introduisent et la pluralité conflictuelle et l'évolution  historique. On peut donc se demander si l'entreprise commémorative,  comme visée de production d'une unité, n'est pas, à certains égards,  illusoire.

 

Philippe Raynaud, « La commémoration: illusion ou artifice ? », Le Débat, n° 78, janvier-février 1994.

 

DOCUMENT 3

     Les jeux ambigus de la mémoire

 

La commémoration de la libération de Paris a mêlé le mythe et l'Histoire

 

« On ne parle tant de mémoire que parce qu'il n’y en a plus », écrit Pierre Nora dans la présentation de ses Lieux de mémoire, vaste inventaire des monuments, emblèmes et symboles qui constituent l'héritage historique de la France. Les grandes célébrations appartiennent à ce patrimoine qui permet aux Français de construire, à travers le temps, leur identité nationale. La commémoration de la libération de Paris, après celles de la Révolution à y a cinq ans et du débarquement de Normandie il y a quelques semaines, participe donc de la même volonté de mémoire qui tente de conjurer l'accélération du changement pour empêcher une irrémédiable rupture avec le passé.

 

Le succès populaire des manifestations organisées ces derniers jours dans la capitale montre assez que ce besoin existe et qu'il importe à beaucoup de nos contemporains, alors que s'éloigne à grands pas la France d'hier, de retrouver, ne serait-ce que fictivement, le sentiment de la continuité. Dans les incertitudes du présent qui favorisent, en cette fin de septennat, les politiques prudentes et les querelles subalternes, sans doute aspirent-ils à une parole forte et mobilisatrice - que le verbe du général de Gaulle sut jadis incarner. (...)

 

Ce retour en arrière ne va pas sans quelques arrangements avec la vérité historique. On a beaucoup insisté, au cours de ces cérémonies, sur la libération de la capitale par ses habitants révoltés, sans s'attarder sur le rôle des Alliés. On a volontairement oublié la contribution de la Russie à la victoire finale. On a préféré taire les dissensions qui ont affaibli les mouvements de résistance. On s'est empressé d'oublier que tous les Parisiens n’étaient pas transportés d'allégresse et que les collaborateurs n’avaient pas disparu en quelques jours.

 

Il ne faut pas s'étonner de ces silences et de ces distorsions. Car dans ces jeux de la mémoire l'historien est à la fois l'indispensable auxiliaire et l'inévitable intrus. Auxiliaire obligé, puisque, sans le relais de son travail de recherche et de reconstitution, le souvenir s'effacerait ; intrus indésirable, puisque, en mettant l'événement à distance, il refuse les arrangements de l'amnésie sélective. Tel est le paradoxe de la commémoration.

 

S'il est vrai que, dans le monde moderne, la mobilité de la population, qui a appris à s'adapter aux dimensions de la ville, puis à celles de la planète, a entraîné une séparation insurmontable entre le passé et le présent, coupant les racines de la mémoire vivante ou la limitant à quelques « lieux de mémoire » dûment répertoriés, la commémoration, entre histoire et mémoire, empruntant autant à l'une qu'à l'autre, ne peut être envisagée que sur le mode du spectacle.

 

Le mythe corrigé par l'Histoire

 

Il est peu probable, en effet, que les participants aux célébrations de la libération de Paris soient dupes des légendes qui viennent parfois enjoliver la réalité. Le mythe est corrigé par l'Histoire, et l'Histoire est animée par le mythe. La leçon ne vaut pas que pour la France: en s'enfermant aujourd'hui dans la seule mémoire, telle que la forgent les aspirations du présent, on court le risque de se crisper sur un passé mythifié, source de tous les intégrismes ; mais en refusant les ressources de la remémoration, on se prive du sens de la durée.

 

En ce « moment charnière », comme le dit encore Pierre Nora, où « la conscience de la rupture avec le passé se confond avec le sentiment d'une mémoire déchirée », les Français vont de commémoration en commémoration pour essayer de renouer les fils de leur histoire.

 

Thomas Ferenczi, Le Monde, 28-29 août 1994.

 

DOCUMENT 4

     Mémoire collective

 

Aucune société ne peut se dispenser de se forger une mémoire collective sous peine de disparaître ou de perdre son unité et sa personnalité. Aussi, au cours de l'histoire, diverses sociétés se sont-elles livrées à des tentatives successives de mémorisation de leur capital intellectuel et technique. […]

 

Mais les données techniques ne sont pas les seules qu’une société se plaise à mémoriser. La mémoire collective a pour fonction de transmettre aussi des symboles, des exemples, des préceptes et d'assurer la diffusion des normes qui régissent la société (ou le groupe). Par ailleurs, la pensée sociale n’est pas abstraite. Elle s'appuie sur des représentations imagées et concrètes d'événements ou de personnages, localisées dans le temps et dans l'espace.

 

Pour reconstruire le passé, un individu fait appel à des points de repère sociaux : ceux que lui offrent sa famille, son groupe religieux ou politique, sa classe sociale ou son groupement de travail. [...]

 

La mémoire collective réalise, sans cesse, un compromis entre le présent et le passé. Elle réactualise continuellement des croyances traditionnelles qui prennent toujours corps dans des personnes ou dans des groupes et elle leur donne le vernis d'idées actuelles, pour que les hommes d'alors les comprennent, s'y intéressent et les acceptent comme leurs.

 

Il en résulte que toute pensée sociale est une mémoire constituée de souvenirs collectifs dont l'importance est suffisante pour que la société en assure la reconstruction à son profit.

 

Encyclopaedia Universalis, Thesaurus-Index, Mémoire collective, 1990.

 

 

DOCUMENT 5

     La mémoire de l’offense

 

Le meilleur moyen de se défendre contre l'invasion des souvenirs accablants est d'empêcher leur entrée, d'élever un barrage sanitaire le long de la frontière. Il est plus aisé d'interdire à un souvenir d'entrer que de s'en délivrer après qu'il a été enregistré. C'est à cela  que servaient principalement nombre d'expédients imaginés par les commandements nazis pour protéger les consciences des hommes commis aux plus sales besognes et s'assurer des services qui étaient désagréables même aux scélérats les plus endurcis. Afin que le  massacre fût embrumé par l'ivresse, on distribuait de l'alcool à volonté aux Einsatzkommandos chargés, à l'arrière du front russe, de  mitrailler les civils au bord des fosses communes que les victimes avaient été forcées de creuser elles-mêmes. Les euphémismes bien connus (« solution finale », « traitement spécial », le terme même  d'Einsatzkommando, qui signifiait littéralement  « unité d'intervention », mais masquait une réalité effrayante) ne servaient pas seulement à égarer les victimes et à prévenir des réactions de défense,  ils visaient encore, dans la limite du possible, à empêcher l'opinion  publique, ainsi que les unités de l'armée non directement impliquées, de prendre connaissance de ce qui était commis dans tous les territoires occupés par le IIIème Reich.

 

Du reste, l'histoire entière du « Reich millénaire » peut être relue comme une guerre contre la mémoire, une falsification de la  mémoire à la Orwell, une négation de la réalité allant jusqu’à la fuite  définitive hors de la réalité. Toutes les biographies de Hitler, divergeant sur l'interprétation à donner de la vie de cet homme tellement difficile  à classer, sont d'accord sur cette fuite de la réalité qui a marqué ses dernières années, surtout à partir du premier hiver russe. Il avait interdit et  refusé à ses sujets l'accès à la vérité en empoisonnant leur morale et leur  mémoire, mais, dans une mesure croissante jusqu'à la paranoïa du Bunker, il s'était barré aussi à lui-même le chemin de la vérité. Comme  tous les joueurs de hasard, il avait construit autour de lui une scène de théâtre faite de mensonges superstitieux à laquelle il avait fini par croire avec la même foi fanatique qu'il exigeait de chaque Allemand. Son  effondrement final n’a pas été seulement une délivrance pour le genre humain mais aussi une démonstration du prix à payer lorsqu’on manipule la vérité.

 

Primo Levi, La Mémoire de l'offense, Le Serpent à plumes, 1986.

 

 

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