La logique pédagogique de l’enseignement professionnel résulte d’un équilibre entre la formation générale, la formation professionnelle et l’environnement économique, ce qui fonde sa spécificité et son identité. C’est pour renforcer cette logique que le projet pluridisciplinaire à caractère professionnel a été introduit en terminale BEP et première et terminale baccalauréat professionnel. Ce projet pluridisciplinaire vise en effet le renforcement d’une démarche de type inductif dans toutes les disciplines, à partir d’une réalisation concrète, liée à des situations professionnelles. Il permet également de développer l’acquisition de savoirs et savoir faire liés au travail en équipe, à la recherche documentaire et à une réalisation pratique.

 

Pour un stagiaire désireux de s’impliquer pleinement dans la vie de l’établissement, malgré le peu d’heures de cours qu’il y dispense, la participation à un projet multidisciplinaire est une opportunité à ne pas manquer. En effet, il permet de souder les liens à l’intérieur d’une équipe pédagogique, de s’intégrer et de se faire pleinement reconnaître par ses collègues.

 

Cette expérience est d’autant plus enrichissante que la nouveauté du projet interpelle et invite à une remise en question des pratiques anciennes d’enseignement. Au milieu de toutes leurs interrogations, les miennes n’étaient pas les moins nombreuses. Au lieu de tomber sur une équipe rodée et formée à la démarche du PPCP, à l’intérieur de laquelle je n’eusse eu qu’à me laisser porter, je me trouvai confronté aux mêmes problèmes et aux mêmes hésitations que l’ensemble des collègues.

 

Voilà qui n’était guère rassurant dans l’optique de la rédaction d’un mémoire professionnel sur le sujet, mais je ne pouvais rêver de situation professionnelle plus authentique, à l’intérieur de laquelle l’enseignant devait réfléchir à l’articulation possible entre le terrain et la circulaire ministérielle introduisant le PPCP.

 

Comment rebondir lorsque, au moment de la rentrée, on découvre une directive ministérielle invitant les enseignants à de nouvelles orientations dans leur pratique professionnelle ? Comment mettre en œuvre un PPCP empli de bonnes intentions pédagogiques, mais laissant l’enseignant partiellement démuni quant à sa mise en œuvre ? De nouveau mis à l’honneur, quelle place exacte l’enseignement général (pour ce qui me concerne ici, le français) occupera-t-il au sein du PPCP ? Enfin, comment travailler en groupe, le problème se posant aussi bien pour les élèves que pour les enseignants, au sein d’équipes multidisciplinaires ?

 

L’aventure du PPCP m’est alors tantôt apparue comme une gageure, tantôt comme un défi à relever : sans vouloir céder à l’effet de mode, la nouveauté du projet m’a séduit et a stimulé mon goût pour la recherche ; toutefois devais-je ne pas oublier la caractéristique professionnelle de ce mémoire et devais-je prendre garde à ne pas me perdre en ratiocinations diverses qui, si elles pouvaient rendre compte d’une réflexion, risqueraient néanmoins d’effacer la pratique. C’est donc à une réflexion sur sa pratique que doit se livrer le stagiaire.

 

Je dois au préalable prévenir contre une mauvaise interprétation de mes intentions lorsque, avant de réfléchir en détail sur ma propre pratique professionnelle, je suis amené à considérer et à interroger, au moins en surface, celle des autres, dans la mesure où nous nous plaçons dans une démarche collective.

 

En effet, suite au caractère multidisciplinaire du projet et à la problématique du travail en groupe qu’il appelle, je serai amené à dresser un bref bilan critique sur notre approche collective. Il ne s’agit nullement ici de critiquer des collègues émérites, impliqués et appliqués, ni d’interroger les pratiques professionnelles de chacun dans sa spécificité – ce pour quoi je n’ai d’ailleurs pas la compétence requise. Au contraire, c’est la démarche collective qui est interrogée, mais celle-ci ne saurait véritablement exister si chacun se réfugie derrière sa spécificité et fuit le regard extérieur qui se pose inévitablement sur sa pratique en vue, non pas de la dénigrer, mais de l’harmoniser avec la sienne propre.

 

La peur de heurter la susceptibilité ou les habitudes de chacun risquerait de paralyser un projet qui, finalement, est un coup d’essai accompagné de tâtonnements pour tous, compte tenu de la nouveauté du PPCP. Aussi mon ambition consiste-t-elle simplement à offrir quelques pistes de réflexion qui n’ont aucun caractère définitif et qui se prêtent volontiers à la critique, mais ont du moins le mérite d’attaquer de front la nouveauté pour la soumettre au questionnement de notre propre expérience de terrain et en mesurer les points forts et les faiblesses – et si mon expérience est petite, mes questions sont nombreuses !

 

Après avoir réfléchi sur la définition et les objectifs du PPCP, nous nous demanderons dans quelle mesure ce projet se veut novateur et s’inscrit en même temps dans la continuité de pratiques d’enseignement déjà existantes, dissipant ainsi l’idée reçue selon laquelle il aurait surgi ex nihilo au cours de la saison estivale et afin de mieux en cerner les enjeux . Cette première approche ne manquera pas de soulever d’emblée un certain nombre de questions ou de problèmes qui prendront toute leur ampleur au moment de la mise en œuvre collective. La pratique collective nous renverra à ma pratique individuelle, dans le cadre de l’enseignement du français au sein du PPCP, à travers la mise en place d’activités d’écriture pour un journal.