B ) Les compétences mises en œuvre

 

Pour pouvoir répondre à l'objectif rédactionnel pour lequel ils sont sollicités, les élèves doivent être capables d'identifier un certain nombre de caractéristiques des textes à produire, afin de les reproduire à leur tour et de se les approprier.

 

1 ) Identifier les différents discours

 

Les différents types d'articles envisagés mobilisent l'ensemble des stratégies discursives de la langue, tantôt séparément, tantôt conjointement. Les élèves identifient assez aisément les discours narratif et descriptif, mais ils confondent les discours explicatif et argumentatif. Ce dernier est peut-être le plus délicat car perçu comme étant le plus "abstrait". Sans doute ce caractère abstrait justifie-t-il sa position terminale dans les apprentissages du français au collège ; par conséquent, l'expérience de l'argumentation est assez récente, même pour des élèves de Terminale BEP.

 

D'une manière plus générale, nos élèves ont du mal avec les abstractions et avec les assertions au second degré : il n'y a qu'à constater combien l'étude de l'humour ou de l'ironie dans les textes littéraires peut être délicate et exiger d'énormes efforts de transposition.

 

La maîtrise des formes de discours s'avère capitale : elle permet par exemple aux élèves travaillant sur le portrait de distinguer ce genre de l'interview, en opposant le texte narratif et descriptif au texte dialogué et prenant la forme d'un jeu de questions - réponses. On sait au demeurant qu'il peut exister des portraits dialogués, mais on se limitera à la forme canonique du genre.

 

2 ) Identifier la typologie des articles

 

Cette compétence est supposée déjà acquise depuis l'année dernière. D'ailleurs, les élèves identifient assez aisément les types d'articles les plus courants qu'ils ont l'habitude de rencontrer à l'intérieur d'autres supports, tels que les revues par exemple : leur compétence de lecteur leur permet de reconnaître une interview, un fait divers ou un sondage.

 

Toutefois, ils ont des difficultés - ô combien prévisibles ! - à formuler clairement les caractéristiques formelles principales de ces textes et à énoncer les critères permettant de distinguer certains genres proches : par exemple, certains ne perçoivent pas la différence entre le portrait et l'interview qu'ils considèrent comme deux appellations distinctes pour une même réalité, dont la finalité serait de présenter un personnage ou une personnalité ; d'autres découvrent que le portrait peut être aussi une production écrite et non pas exclusivement l'apanage des musées ou des collections privées.

 

Je réalise d'emblée la nécessité de consolider avec eux l'analyse des caractéristiques formelles des textes prévus pour le journal ; à ce stade, j'espère qu'il ne s'agira que d'un simple rebrassage de compétences déjà acquises en première année de BEP et que je n'aurai pas m'empêtrer dans des considérations techniques ou formelles qui, si elles s'avèrent nécessaires, risqueraient cependant de les ennuyer et de les détourner du plaisir du texte pour ce qui les concerne, et me détourneraient pour ma part de mon objectif premier, à savoir un travail d'écriture et non pas de lecture.

 

Ce premier constat soulève donc le problème des pré-requis et des pré-acquis. N'aurais-je pas dû procéder au préalable à une évaluation diagnostique qui m'eût permis d'apprécier les aptitudes véritables des élèves ? Une autre interrogation surgit : comment prolonger un travail annoncé avec un objectif donné quand on s'aperçoit que les pré-requis ne sont pas complètement en place alors qu'ils devraient l'être (non pas qu'ils n'aient pas été abordés efficacement au cours de l'année précédente, mais parce qu'ils ne sont plus qu'une vague réminiscence, même chez ceux à qui la mémoire fait le moins défaut) ?

 

De plus, s'il fallait les reprendre intégralement, ces pré-requis (i.e. la compétence de lecture d'articles de presse) supposeraient à eux seuls une séquence complète, conduite sur environ deux ou trois semaines : comment intégrer alors un travail préliminaire aussi important à l'intérieur du PPCP, sans risquer de lasser un public qui aurait rapidement le sentiment que le projet s'éternise ? Sans compter enfin le fait que la séquence de lecture sur la presse ayant déjà été traitée en première année, l'approche de la Terminale ne saurait être la répétition de ce qu'ils ont déjà fait, sous peine de rompre les principes dynamiques de progression et de renouvellement d'une année sur l'autre.

 

Ne pouvant revenir en arrière complètement, nous estimons avec Mme Maneux qu'un rapide rebrassage s'impose. C'est la raison pour laquelle je décide d'élaborer un certain nombre de fiches synthétiques (cf. annexe), portant sur les différents types d'articles et illustrées par des textes courts empruntés à la presse. Ces fiches reprennent les principales caractéristiques des articles, précisent les attentes quant à la production écrite à remettre et livrent quelques conseils d'ordre méthodique. Ainsi les élèves concernés par l'élaboration de la "une" du journal ont dû (de nouveau) réfléchir à son fonctionnement au préalable, à partir d'un document authentique. J'ai accompagné ce dernier d'une série de questions induisant une démarche conceptuelle à même de leur faire dégager les caractéristiques principales du genre.

 

Les fiches suivantes adoptent une démarche déductive plutôt qu'inductive, ce qui peut apparaître sans doute comme étant leur point faible si on les tire de leur contexte ; je le rappelle, en effet, elles ne devaient être qu'un outil d'accompagnement pour l'élève et non pas l'objet d'apprentissages nouveaux.

 

Le point faible de la remédiation ne tarde cependant pas à faire ressentir ses effets pernicieux : certaines fiches paraissent complexes ou abstraites aux élèves, faute d'avoir été élaborées avec eux de manière inductive et à partir d'exemples étudiés en détail et avec la lenteur requise. En effet, le rebrassage était trop rapide et se contentait de renvoyer la majorité des élèves à leurs lacunes préalables. Je n'avais donc finalement pas véritablement avancé et si, pendant un laps de temps très bref, les fiches livrées de cette manière peuvent donner quelque bonne conscience au professeur, le retour de manivelle ( ou "effet boomerang" ) ne se fait pas attendre puisque, dès les premières productions écrites, certains élèves ne distinguent pas le fait divers d'une fiction ( "Faut-il imaginer le fait divers ? " ), tandis que d'autres confondent portrait et interview, et se lancent dans ce qu'ils croient être un portrait sous la forme d'un jeu de questions - réponses.

 

Il conviendrait donc de se méfier des rebrassages dits "rapides" et possédant un caractère trop magistral pour prendre le temps de mesurer les besoins véritables des élèves et les pallier.

 

Il me semble que cette démarche de remédiation est symptomatique et soulève également les questions suivantes : dans quelle mesure peut-on espérer exploiter les acquis supposés des années précédentes, que des professeurs émérites et engagés se sont efforcés de bâtir avant nous ? Sommes-nous inlassablement conduits à rabâcher pour un nombre d'élèves, hélas !, majoritaire ? Le PPCP peut-il être ici l'occasion d'une sorte de grande répétition générale qui consoliderait les apprentissages des élèves et leur ferait saisir la cohérence d'ensemble de leur formation, sur les plans disciplinaire et professionnel ?

 

3 ) Exploiter les principaux indicateurs de subjectivité

 

Les élèves peuvent les appliquer essentiellement aux textes descriptif et argumentatif, où les expansions nominales et les adverbes deviennent leurs outils privilégiés. Bien que la fiche sur le portrait stipule clairement en consigne d'utiliser l'éventail des expansions nominales, l'atelier concerné s'est contenté de quelques adjectifs qualificatifs ; d'autre part, il n'a pas varié les points de vue et s'est cantonné à une focalisation externe. La difficulté du dépistage des marques de la subjectivité dans un texte explique leur propre difficulté à en produire. Sans doute aurait-il fallu être beaucoup plus directif pour ce type de production.

 

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